Entrevue avec la Dre Thérèse Perreault
C’est au seuil de l’adolescence que la Dre Thérèse Perreault décide qu’elle ferait sa marque dans le monde. Même aujourd’hui, comme pédiatre à l’Hôpital de Montréal pour enfants depuis 1988 et chef de division de l’Unité de soins intensifs néonatals (USIN) depuis 2003, la Dre Perreault ne peut même pas imaginer autre métier que celui de médecin. Cette édition de Un médecin passionné va à sa rencontre.
Docteure Perreault, quand avez-vous compris que vous vouliez devenir médecin?
Aussi loin que je me souvienne, j’avais 12 ans lorsque j’ai compris que c’était cela que je voulais faire. Cela fait bien longtemps ! J’ai déjà eu une légère hésitation au CEGEP parce que j'aimais bien la chimie mais je suis vite revenue à ma première idée.
Êtes-vous entrée à la faculté de médecine avec une idée claire de la spécialisation médicale que vous vouliez entreprendre ?
Lorsque j’étais résidente, je me rendais bien compte que la pédiatrie exerçait une fascination sur moi. J’ai toujours aimé être entourée d’enfants. Ils sont directs et très authentiques. J’aimais les procédures et les soins aigus mais je me suis toujours sentie plus à l’aise avec les enfants. J'ai considéré la chirurgie, mais, comme je pensais que les chirurgiens avaient une vie de fou, j’ai opté pour la néonatalogie.
Étiez-vous consciente que travailler à l’Unité de soins d’urgence néonatals au Children comportait de grands défis?
Je l’ai découvert! Assurément, c’est une lourde responsabilité, mais la satisfaction est là aussi. Il est très gratifiant de voir les enfants quitter L’USI et revenir nous visiter avec leurs parents. C’est un moment précieux car on sent alors que l’on a réellement fait une différence.
Vous occupez-vous seulement des bébés prématurés ou aussi des petits ayant d’autres problèmes de santé?
Les prématurés sont des bébés qui naissent à moins de 37 semaines, et nous avons un nombre important de ces cas : ils représentent la moitié des admissions à l’USIN. Ce ne sont pas toujours les cas les plus difficiles que nous voyons, tout dépend de leur degré de prématurité. Parfois, les bébés à terme naissent avec de nombreuses anomalies congénitales qui représentent des défis majeurs. Mais pour les parents, et c’est compréhensible, un enfant malade est un défi en soi parce qu’il s’agit de leur enfant et que cela est très important.
Maintenant que le Children a déménagé au Campus Glen, comment la proximité entre l’USIN et le département des naissances au Royal Vic a-t-elle affecté votre travail?
C’est l’un des changements les plus fantastiques qui soient ! C’est un mieux autant pour les bébés que pour les familles ayant des enfants nécessitant une attention immédiate : le bébé n’a pas à être transporté en ambulance et a accès à tous les pédiatres et autres spécialistes sur le champ. Le travail d’équipe avec les obstétriciens s’en trouve amélioré et les soins pour les bébés aussi. Avoir la possibilité de travailler ensemble main dans la main est l’un des plus grands accomplissements. Nous sommes dans la bonne direction !
Peut-on dire alors que cette proximité fait de l’Hôpital de Montréal pour enfants un vrai centre mère-enfant, à l’instar de l’autre hôpital pédiatrique de la ville qu’est Sainte-Justine?
Absolument, mais bien plus que cela : si la maman a besoin de soins intensifs, elle peut être soignée sur place. Cela fait une grosse différence.
Quel est l’aspect de votre travail que vous trouvez le plus difficile?
C’est de maintenir le haut niveau de soins que nous dispensons avec des ressources en constante diminution. Comme on dit, «faire plus avec moins». Toutefois, et je sais que je passe pour une optimiste, je suis convaincue que c’est seulement lorsque nous sommes confrontés à des défis que nous trouvons des solutions. Si nous ne sommes jamais remis en question, nous restons dans notre zone de confort et nous perdons des occasions de découvrir des solutions qui seraient bénéfiques au plus grand nombre.
Quelle est la chose la plus importante que vous ayez apprise au contact des patients et de leur famille qu’on n’aurait pas pu vous enseigner en classe?
Les familles nous apprennent beaucoup sur la résilience et l’adaptation. Parfois, nous aimerions avoir une boule de cristal et être capables de prédire l’avenir, mais en toute humilité, je dis aux patients que je peux me tromper. C’est la leçon, je pense, que nous donnent les familles : nous sous-estimons parfois nos pronostics alors qu’ils peuvent être bien meilleurs que ce que nous avions anticipé.
Pouvez-vous vous imaginer faire autre chose que pratiquer la médecine?
Après toutes ces années, je dirais probablement non ! Vous savez, la médecine est un vaste domaine d’activités à découvrir, comme la gestion médicale, la psychologie médicale, etc. La médecine touche tous les aspects de la vie. Oui, je suis très à l’aise dans cette niche que j’ai choisie.